Salla Tykkä

4 mai - 25 juin 2006

Zoo

Installation vidéo
Projection de la trilogie Cave

Vernissage Mercredi 3 mai, dès 18h
Mardi - Dimanche 12h - 18h

"I have wondered about the way people see their lives. If you close your eyes and then use your memory, it's like a film."
Entretien avec Francis McKee, in Salla Tykkä, NIFCA publication 09, 2001

Salla Tykkä, Zoo, 2006

Zoo le dernier film de Salla Tykkä ressemble aux précédents en ce qu'il raconte une histoire énigmatique, qui nous tient en haleine, recourt à un genre cinématographique référencé dont les codes sont habilement utilisés, magnifie le regard et propose des images d'une singulière beauté.
Ce qui frappe également, aussi bien dans la trilogie Cave 2 , que dans Zoo, c'est l'absence de dialogue, la force émotionnelle de la musique et l'attribution du rôle principal à une figure féminine, qui seule modifiera son comportement au cours du film, les autres personnages vaquant à leurs occupations, comme indifférents ou absorbés par leur activité.

Zoo se déroule dans un zoo, décor mi-sauvage, mi-architecturé, à la fois indompté et réglementé. Une femme aux cheveux blonds retenus dans un chignon, vêtue d'un tailleur sombre et munie d'un appareil photographique, s'enfonce dans ce territoire d'une étrange nature. La caméra la suit, les vues sont souvent prises au travers de grillages, de filets ou des vitres, ou encore cadrées par des barrières. La musique composée pour le film provoque instantanément une tension ; suspense que viennent renforcer les mouvements de la caméra, qui dramatiquement se dédouble via l'appareil de photo. Cette dualité est constitutive du film.

Salla Tykkä, Zoo, 2006

Au long de sa promenade dans ce zoo sans visiteur, la femme prend des photographies. À son œil se substitue alors celui du spectateur qui voit ce qu'elle vise. La première image qu'il découvre surprend: la vue est prise sous l'eau et montre un corps immobile flottant à contre-jour. On comprend ensuite qu'il s'agit d'une joueuse d'une équipe de rugby qui se livre bataille sous l'eau. Rien ne semble réunir ces deux mondes, si ce n'est le regard de la femme et celui du spectateur qui les font coexister.

Ces scènes de joutes aquatiques dégagent une puissance dramatique exceptionnelle, minant « la réalité du dessus », et introduisent l'idée d'une « réalité au-dessous » ou subconsciente. Elles vont s'intercaler régulièrement, ponctuant le parcours de la femme et troublant notre perception des événements.
L'histoire continue ainsi : la femme observe autour d'elle, se retourne, photographie des animaux ; la tension monte, elle semble gagnée pas l'inquiétude, puis paniquer, le rythme s'accélère, elle cherche quelque chose ou à fuir, paraît trouver une voie. Renonçant à l' œil intermédiaire qu'est l'appareil photo, elle se jette à l'eau pour rejoindre cet autre monde, dont on ne pourra que supposer ce qu'il signifie pour elle, et en retour pour nous spectateurs.

Salla Tykkä, Zoo, 2006

Nombreux sont les commentaires sur l'œuvre de Salla Tykkä issus des études de genre (gender studies), des théories féministes ou de celle du regard, du freudisme ou du lacanisme ou encore décrivant le rapport autobiographique de l'auteur à son œuvre, l'inscrivant dans la lignée des autoportraits.
Ses films appellent toutes ces interprétations et d'autres encore ; ils affirment aussi une claire filiation avec le cinéma, ses stratégies et sa qualité d'images.

Salla Tykkä connaît les genres populaires que sont le western, le thriller ou la science-fiction et synthétise admirablement les ambiances et émotions propres à ces typologies, nous projetant en quelques minutes efficaces dans leur univers. Elle puise dans le vocabulaire du genre et travaille particulièrement le rythme, selon lequel elle détermine les mouvements de caméra, la durée et le cadrage des scènes, et s'appuie sur l'élément qui vise directement les émotions : la musique 3 .
Si Lasso emprunte au western, Thriller au film d'horreur et Cave à la science-fiction, Zoo fait clairement référence aux films d'Alfred Hitchcock, à leur ambiance, leur part de mystères irrésolus et leurs figures féminines (la femme blonde est calquée sur Kim Novak et Tippi Hedren).

Il ne s'agit pourtant ni d'un western, ni d'un thriller, ni d'un Hitchcock, mais de leur ambiance si typique qui surgit, happant le spectateur. Il est saisi par l'émotion, « pris » dans le film. Or d'un point de vue strictement narratif, la fiction qui se déroule ne comporte aucun élément iconographique qui l'identifierait au genre mis en scène (Lasso ne raconte pas un western, ni aucun l'histoire présupposée du genre).
Entre la fiction, que construisent les images, et la mise en scène, qui emprunte aux codes et rythme spécifiques d'un de ces genres, apparaissent en traits discontinus les valeurs et l'idéologie que promulgue le genre en question, chacun portant et façonnant un regard particulier sur le monde.

Et c'est ce regard que Salla Tykkä débusque. Les films, tant du petit que du grand écran, reflètent les tendances et les relations de pouvoir mises en place par la société, les confirment et fabriquent notre regard, formatent nos rêves, nos attentes et nos émotions, et ceci tant dans la réalité que dans le cinéma.

" ... I became interested in the relationship between the moving images and reality. I was intrigued by the immaterial nature of film and video and their ability to resemble reality and its elements, such as dreams and memories. I thought that films could form a part of personal experience and memory, and steer a person's conception of him or herself and the world. »
Salla Tykkä, janvier 2004 in Salla Tykkä, Cave, X/rummet Statens Museum for Kunst , 7. Februar – 25. April 2004

Salla Tykkä pointe donc une certaine manière de regarder qu'elle couple avec une épiphanie. La mise en scène du regard et de ses attributs iconographiques - les surfaces réfléchissantes, la fenêtre, l'objectif - structurent l'avancement de l'histoire et renvoient à une série de dualités : l'opposition monde intérieur versus monde extérieur, ou voir et être vu, etc, qui en détermine l'interprétation. Ces contextes duels créent la dynamique de la transformation. D'un film à l'autre, les figures féminines évoluent, elles changent le regard qu'elles portent sur leur entourage et dans un mouvement de balancier, modifient la perception et l'image qu'elles ont d'elle-même. Elles acquièrent une liberté individuelle, qui se voit de surcroît confirmée par la liberté que toutes prennent par rapport à l'histoire qui devrait se dérouler, déplaçant les attentes quant au contenu supposé, prêtes à relever le défi d'un nouveau rôle. Cette exposition sera l'occasion de présenter la pièce Zoo, ainsi que de projeter la trilogie Cave.

Isabelle Aeby Papaloïzo

Salla Tykkä, Zoo, 2006

Salla Tÿkka eest née à Helsinki en 1973. Elle vit et travaille toujours dans cette ville.

 

Expositions individuelles

2005 A Whiter Shade of Pale, Kunstraum Hüll, Hüll, Allemagne

2004 Finnish Institute, Stockholm, Suède
Portikus, Frankfort, Allemagne Fact, Liverpool, Grande-Bretagne Cave, Statens Museum for Kunst, Copenhag, Danemark

2003 Happy Days, Collection Lambert, Avignon, France Tensta Konsthall, Stockholm, Suède
The Institute of Visual Arts, Milwaukee, U.S.A
Museo de Arte Carillo Gil, Mexico, Mexique
Distance, Künstlerhaus Bethanien, Berlin, Allemagne
Cave, Tramway, Glasgow, Grande-Bretagne
Herbert F. Johnson Museum of Art, Ithaca, U.S.A

2002 Thriller, Kiasma, Museum of Contemporary Art, Helsinki, Finlande Pain, Pleasure, Guilt, Bawag - Foundation, Vienne, Autriche
Kunsthalle Bern, Berne, Suisse
Hidden Forces, Galerie Yvon Lambert, Paris, France

2001 Lasso, Delfina Project Space, London, Grande-Bretagne
1999 Power, Studio Mezzo, Helsinki, Finlande
1997 Healthy Young Female, Gallery of the Academy of Fine Arts, Helsinki, Finlande

 

Expositions collectives (sélection)

2005 Selbstauslöser, Kunsthalle Fridericianum, Kassel, Allemagne
Self Discipline, Overgaden, Copenhag, Danemark

2004 Down Here, Bergen Kunsthall, Bergan, Norvège Louisiana Museum of Modern Art, Danemark Nuclear war, Kunsthaus Dresden, Dresden, Allemagne Gokann, Kunsthalle Helsinki, Helsinki, Finlande
A Fripon, Fripon et demi, Collection Lambert, Avignon, France

2003 Girl's night out, Orange County Museum of Art, Newport, U.S.A Girls don't cry, Parco Museum, Tokyo, Japon
Transparente, Museo Nazionale Delle Arti del XXI secelo, Rome, Italie New Realities, Hasselblad Center, Gothenburg, Suède The Squared Circle, Walker Art Centre, Minneapolis, U.S.A

2002 Edstrandska Nordiska Stipendium, Malmö Konsthall, Suède Power, Casino Luxembourg, Luxembourg
Les Enfants du Paradis, Galerie Yvon Lambert, Paris, France Centre of Attraction, Contemporary Art Centre, Vilnius, Lituanie
ArtUnlimited, Basel, Suisse
Greyscale/CMYK, Tramway, Glasgow, Grande-Bretagne Kenen jäljillä?, Salo Art Museum, Salo, Finlande
Fantasies, Sara Hildén Art Museum, Tampere, Finlande Beyond Paradise, Bangkok, Thailande / Kuala Lumpur, Malaisie

2001 Trans Sexual Express, Budapest, Hongrie / A Coruña, Espagne Voltti, The Lönnström Art Museum, Rauma Art Museum, Rauma /
The Finnish Museum of Photography, Helsinki, Finlande
Identity, Oulu Art Museum, Oulu, Finlande
Trans Sexual Express, Centre d'Art Santa Mònica, Barcelone, Espagne
La Biennale di Venezia, Venise, Italie
Rock the Campo, Venise, Italie
BIDA, Valence, Espagne

2000 Master Degree Show, The Academy of Fine Arts, Helsinki, Finlande Beauty Queens, Art Centre Ahjo, Joensuu, Finlande
1999 ArtGenda Retro, Stadtgallerie Kiel, Kiel, Allemagne
1998 Intimacies, Rethymnon Centre for Contemporary Art, Grèce
The Nude and the Masked, Helsinki City Art Museum, Helsinki, Finlande
ArtGenda, Kulturhuset, Stockholm, Suède

 

Prix et nominations

2004 Nomination for ArsFennica prize, Finlande
2002 Edstrandska Nordiska - Stipendium, Suède
2002 DZ Bank -Prize, Allemagne
2002 Honourable Mention (Lasso), S Media City Artate / Hot, Ontario, Canada
2001 Nomination for Gilles Dusein Prize, France